Hier soir....
Pour une fois, je serais bien incapable de vous dire ce qu'il s'est passé hier soir, chez les Ludopathes. Etions-nous nombreux ? Aucune idée... 10 ? 15 peut-être. Quels jeux ont été joué ? Autant me demander si Angelina Joly va quitter ce cher Brad. Power Struggle visiblement, TimeLine, ça c'est sûr, et un Caylus me souffle-t-on.
Non, aucune question que vous pourrez me poser ne trouvera réponse ici. Mais pourquoi cette ignorance soudaine ? Aurais-je oublié de venir communier avec mes compagnons Ludopathes ? Que nenni : j'étais bien parmi vous. En réalité, j'ai été la victime d'une faille temporelle qui a sévit entre 20h30 et 1h30 du matin. Son nom ? Sid Meier's Civilization : The Board Game. Durant 5 heures (très très longue partie, je vous le confirme !), je n'ai eu d'yeux que pour ses tuiles de cartons épais, ses Merveilles tape-à-l'oeil et ses cartes innombrables.
Cette quatrième partie fut longue. Ce n'est rien de la dire. Là où les deux premières avaient été torchées en à peine 3h30, celle-ci a côtoyé les 5 heures d'affilée. Une première explication peut, il est vrai, venir du fait que deux joueurs (re)découvraient le jeu : Jim et Renaud. C'était pourtant le cas des 3 parties précédentes. D'autres avanceront qu'en expliquant les règles au fur et à mesure de la partie, j'ai fortement ralentit la partie. Ou encore que Renaud réfléchit presque aussi lentement réveillé qu'endormi pour le même résultat (Private Joke
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). Ils auraient certainement raison. Mais, hier, ce qui nous a ralentit à mon humble avis, c'est surtout l'apparition d'un facteur très peu présent lors de nos premières parties : l'interaction.
L'interaction ! C'était justement une de mes interrogations concernant le jeu. Cette tendance, observée lors des deux premières parties, qu'avaient les joueurs à se développer dans leur coin, sans trop s'enquérir de ce que faisaient leurs voisins. Très peu de négociation, aucune possibilité autre que le militaire de gêner la progression d'un adversaire et l'impossibilité de suivre l'évolution des autres étaient quelques uns des symptômes observés. Malgré l'enthousiasme d'un Perfidius sur ce sujet, j'avoue que je me posais nombre de questions. Ma troisième partie y avait apporté un début de réponse : j'avais envoyé très tôt une armée se promener sur le territoire de Guillaume et l'avait ainsi freiné dans son développement. Mieux, à la fin, une sorte de coalition des 2 joueurs les plus en retard s'était faite à mon encontre et avait habilement tenté d'user du pouvoir du communisme pour m'empêcher de gagner. Ce début de réponse allait-il se confirmer dans notre 4e partie ?
Jim, Renaud, Guillaume et moi débutions, sourire aux lèvres, salivant à l'avance à l'idée de l'excellent moment ludique qui nous attendait. Malheureusement, les premiers tours furent laborieux et j'en assume la pleine responsabilité : en voulant dynamiser le jeu, j'avais choisi de n'expliquer les règles du jeu à Jim que phase après phase. Bien mal m'en pris. Le jeu en fut non seulement ralentit mais, surtout, le pauvre Jim fut totalement perdu. Déjà noyé par l'anglais présent sur chaque carte, il passa les deux premières heures à subir le jeu sans trop savoir quoi faire (ni comment le faire).
Cela ne l'empêchait toutefois pas d'être le premier parmi nous à créer sa deuxième puis sa troisième ville. Etant Chinois, il exploitait admirablement son pouvoir spécial (+3 culture / village ou hutte pillés) en prenant nettement la tête sur la piste de culture. Dans la foulée, il développait diverses technologies et bâtiments destinés à accélérer encore sa progression sur cette voie. Du coup, je le voyais bien parti pour la victoire alors que n'avions même pas fait 1/3 du jeu.
Ce sentiment était renforcé par le fait que Renaud, comme lors de sa première partie, semblait se développer sans objectif précis : peu de militaire, un poil plus de culture, pas d'économie et une accumulation de technologies niveau I. La faute encore une fois, à une deuxième ville mal placée (?) et, surtout, à une 3e ville posée très tardivement, alors que nous entrions dans le sprint final. Peut-être aurait-il du économiser son commerce, quitte à ne pas faire de rechercher à un tour donné, pour rechercher plus tôt l'irrigation et ainsi construire sa 3e ville (et donc obtenir sa 3e action / tour !!). Cela lui aurait évité d'accumuler inutilement les recherches lvl I.
De son côté, Guillaume semblait fidèle à lui-même : il faisait en 3e technologie, le Metal Working lui permettant rapidement de construire 2 Barracks, accumulait les armées et les unités. Bref, je le voyais repartir sur le Militaire, pour la 4e fois consécutive (sur 4 parties !). Je le prenais donc immédiatement pour cible (ça, plus le fait qu'il était le seul à part moi à bien connaitre le jeu).
Enfin, me concernant, je passais 3 tours à hésiter sur la victoire à viser (économique, militaire ou culturelle ?). 3 tours qui peuvent peser lourd dans un jeu qui se veut une course. Ayant pris rapidement l'Equitation de façon oportuniste (prendre 2 huttes sous le nez de mes adversaires et construire ma deuxième ville plus rapidement), je me retrouve à pouvoir obtenir facilement beaucoup de commerce. Etant Américain, je sais que cela signifie avoir beaucoup de production. Je me lance donc sur les Merveilles. Guillaume ayant déjà construit le Colosse de Rhodes, je me rabat sur Stonehenge et décide du coup de la marche à suivre : ce sera une victoire culturelle. Dès lors, je vais clairement m'orienter vers cette stratégie en abusant des technologies convertissant l'encens en culture et en construisant le Louvres (+3 Culture / tour). Et cela marche : je commence à gagner les points de culture par poignées et rattrape rapidement Jim sur la piste puis le dépasse. Je deviens dès lors une cible de choix. Je décide donc de passer les tours suivant à me blinder militairement, histoire de me protéger de Jim (2 généraux !) et de Guillaume (que je crois toujours parti pour une victoire militaire). Dans le même temps, je fais un usage intensif et agressif des cartes cultures : destruction de 2 barracks de Guillaume, assassinat du général de Jim, déforestation, etc.
Nous attaquons le dernier tiers du jeu. Guillaume révèle enfin sa véritable stratégie : la victoire technologique. Il envoie coup sur coup 3 armées chez moi pour me piquer mes technologies et parfaire ainsi sa pyramide. Mais il a encore besoin de temps pour espérer l'emporter ainsi. Et de temps, il en manque car je ne suis plus très loin de la dernière case de la piste de culture. Il va donc fomenter un plan machiavélique. Cela commence par négocier avec Jim l'échange d'une ressource particulière (cachée). Une fois sa ressource acquise, il peut découvrir le Pouvoir de l'atome. Il était temps : dans un tour, s'il ne fait rien, je gagne grâce à la quantité astronomique de culture que produisent mes villes (24 pts / tour !!).Il exécute alors son plan : en utilisant la ressource "Uranium" échangée avec Jim, il envoie une bombe atomique sur Philadelphie, ma ville "culturelle" par excellence. La ville, les bâtiments, la Merveille (Le Louvres) mais également les Personnages Illustres accumulés disparaissent sous le champignon atomique. J'accuse difficilement le coup : il vient de raser l'équivalent de 10 pts culture par tour ! Je ne pourrais plus gagner au prochain tour et perd une action par tour ! L'handicap est important.
Le dernier sprint est donc lancé et c'est Guillaume qui part avec une longueur d'avance. Il lui faut 1 tour pour gagner. Voilà un ultimatum qu'il me faut à tout prix battre pour espérer l'emporter. Je tente donc le tout pour le tout : miser tout ce qui me reste sur la culture. Avec l'avance que j'y ai prise (plus que 3 cases à parcourir), j'espère que cela suffira. Mais le handicap de la bombe A est trop important. Il me faudrait au mieux deux tours pour espérer l'emporter. Il me faut trouver un moyen de le ralentir coûte que coûte ! J'abat donc les unes après les autres les nombreuses cartes "Culture" accumulées : je lui détruit ainsi 2 armées, un aqueduc et un port. L'estocade n'est que du pipi de chat comparé à la bombe qu'il m'a lancé. Mais j'espère que cela suffira à réduire suffisamment son revenu en commerce pour l'obliger à perdre un tour à économiser.
Le tour tant craint arrive enfin. Sa Pyramide technologique est quasi complète : il ne lui manque plus que la fameuse technologie niveau 5 qui lui permettrait de remporter la partie. Mais il a besoin de 25 points de commerce d'ici la fin de tour pour la rechercher. En détruisant son aqueduc et son port, j'ai fortement affaibli ses revenus en commerce. Du coup, il lui manque 5 malheureux points pour espérer faire cette dernière technologie. Comment va-t-il réussir à les trouver ? En attaquant quelqu'un pardi ! Une victoire permet en effet de piquer à son adversaire jusqu'à 3 points de commerce. Guillaume sait donc qu'il doit livrer deux fois bataille dans ce tour pour l'emporter. Sauf qu'en lui détruisant 2 armées, j'ai particulièrement affaibli sa capacité de riposte. Il tente néanmoins le tout pour le tout et s'attaque à son frère. Mal lui en a pris puisqu'il perd la bataille d'un cheveux (Renaud peut dire merci à ses Académies). Quand arrive la phase de recherche, c'est la rage au ventre qu'il annonce qu'il ne développe aucune recherche ce tour-ci. La victoire change alors de camps : il me manque 1 point de culture pour l'emporter à mon tour.
Le 13e tour commence. Chacun joue rapidement : l'heure est déjà bien avancée et l'assurance de me voir gagner à mon tour de jeu, pousse mes adversaires à ne pas trop optimiser leurs coups. Pourtant, arrivé à la phase "Gestion des Villes", Guillaume n'a pas dit son dernier mot ! Grâce à l'Ecriture, il annule mon action "dévotion aux arts" sur ma capitale. Je passe ainsi à coté de 6 points de culture ! Malheureusement pour lui, ma deuxième ville dispose d'une merveille. La dévotion aux arts me permet alors de récupérer le dernier point de culture qui me manquait. Je progresse donc d'une dernière case sur la piste de culture et remporte la partie
Pfiou.... Voici un long compte rendu à la hauteur de la partie que nous avons mené. Cela s'est joué à un cheveu que Guillaume ne gagne. A noter, d'ailleurs qui si Renaud ou Jim avaient eu un espion, ils auraient pu bloquer l'action de ma deuxième ville et, ainsi, m'empêcher de gagner au profit de Guillaume. Une excellente partie en tout cas, pleine de rebondissements.
Quid donc de l'interaction ? Après un tel compte rendu, une petite conclusion s'impose concernant ce point clé du jeu. Et force est de constater qu'elle est finalement très présente... par le jeu des négociations, par les cartes cultures, par la guerre, par le marché (pénurie de bâtiments à gogo hier) et par les technologies (pouvoir de l'atome notamment). Son seul frein, en fait, c'est la complexité du jeu et les nombreuses options qu'il propose qui poussent les joueurs qui débutent à rester la tête dans le guidon sans trop regarder ce qu'il se passe autour. Du haut de nos 4 parties, Guillaume et moi avons ainsi très facilement vu (et recherché) les leviers de blocage mis à notre disposition et n'avons ainsi eu de cesse de nous ralentir l'un l'autre tout au long de la partie. Moi par le biais des cartes cultures, lui via les technologies. Du coup, cela s'est ressenti tout autour de la table : Renaud et Jim ont également multiplié les tours d'entourloupes et les phases de négociation ont été le spectacle de beaucoup de promesses (souvent respectées) et de mauvaise foi :P
Vivement l'année prochaine et une partie où les 4 joueurs connaîtront bien le jeu. Les mandales risquent de voler bien bas
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