Et comme j'avais rendez-vous avec Romain pour un petit wargame exclusivement jouable à 2, les 7 autres se sont répartis en deux tables : Jim, Benjamin et Paul sur Through The Ages, Bubu, Alban, Fabrice et un joueur d'ARES (toujours le même. Faudra que je lui demande son prénom. D'autant qu'il est plutôt sympathique
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Comme je le disais, donc, j'avais un rancard avec Romain pour une partie découverte d'un wargame répondant au doux nom de "Combat Commander".
Romain commence par installer le jeu puis m'explique les règles (relativement touffues mais abordables) avant d'installer le scénario que nous avons décidé de jouer. Le premier en fait. Notre choix s'expliquait surtout par le fait que, vu que c'était notre première partie à tous les deux, nous ne savions pas trop où nous mettions les pieds. Le premier scénar utilisant qu'assez peu de troupes et qu'une partie des règles, cela nous a semblé une bonne entrée en matière. Nous avons peut-être eu tort...
Pour ceux qui ne connaissent pas, Combat Commander est un wargame qui emprunte des mécanismes de Mémoire 44, pour la gestion des cartes, et Conflict of Heroes pour la gestion du morale et des dégats, le reste des règles (ligne de vue, portée de tir, mouvement, etc) étant on ne peux plus classique (du moins la partie des règles que nous avons utilisé). En gros, chaque joueur dispose d'une main de carte. A son tour, un joueur peut jouer ses cartes de deux manières différentes : soit en lançant le type d'ordre indiqué sur la carte (Feu, déplacement, soutien, ralliement, etc), soit en utilisant son effet spécial (grenades, fumigènes, tir en rafale, etc). La seule limite concerne le nombre d'ordres qu'un joueur peut donner (décider en fonction du scénario. Ici 2 pour Romain et 3 pour moi) durant le même tour. Les effets spéciaux, quant à eux, ne sont pas limités et peuvent même être joué pendant le tour adverse. Une fois sa ou ses cartes jouées, le joueur complète sa main (4 à 6 cartes selon le scénario) et c'est à son adversaire de jouer. Jusque là, rien que du très classique : Mémoire 44, pour ne pas le citer, reprend le même principe (les effets spéciaux en moins).
Mais les cartes ne servent pas qu'à cela. La grande originalité de Combat Commander, c'est que ces cartes servent également de dés (un résultat 2D6 est indiqué en bas à droite de chaque carte) et de cartes évènements : enrayement, sniper, évènements aléatoires, viennent ainsi pimenter le jeu. Enfin, le temps dans chaque scénario est mesuré par la pioche des cartes : dès qu'un des joueurs a terminé son paquet, le compteur de tour avance d'une case. Le Deck et sa gestion est donc au coeur du jeu.
Une fois sa ou ses cartes lancées, chaque ordre va activer une et une seule unité. Comment monter alors des assauts de grande envergure ? La subtilité, c'est qu'en activant un Officier, on peut dès lors activer, en cascade, toutes les unités se trouvant à l'intérieur de sa zone de commandement. En plaçant bien ses troupes au début du scénario, un joueur peut ainsi activer en 1 ou 2 ordres toutes ses unités. Mais attention : chaque unité ne peux être activée qu'une seule fois par tour. Ce qui veux dire que l'escouade que vous venez de mettre à couvert dans un bosquet ne peux pas tirer dans le même tour ! Avancer ou tirer, il faudra choisir. Le rythme imposé est ainsi délibérément plus lent que dans les autres wargames qui permettent souvent les deux (avec ou sans gestion de points d'action comme CoH).
Dans notre partie, seuls 5 ordres étaient utilisables : feu, déplacement (rapide mais soumis à une riposte adverse), avance (déplacement lent mais l'adversaire ne peut pas vous tirer dessus pendant votre progression), ralliement et désistement. Deux ordres supplémentaires affectent les tirs d'artillerie (absent dans notre scénario), un ne sert à rien (il n'a pour seul but que d'encombrer votre main) plus quelques autres que je ne connaissais pas.
Je n'ai bien sûr fait qu'un rapide survol des règles principales. L'idée n'est pas de vous apprendre à y jouer mais de vous donner les clés pour apprécier et comprendre le résumé de la partie qui va suivre et mon ressenti sur le jeu. Ceci étant fait, passons aux choses sérieuses : la partie.
Je débute au Nord, aux deux coins (N-E et N-O) de la carte, sur deux routes se rejoignant au centre de la carte. Romain, pour sa part, débute au coin S-E et au Sud, à l'autre extrémité des deux routes sus-nommées. A l'Est, une veille église représentera l'objectif n°5 (objectif secret de Romain). Au N-O, un passage étroit de la route à travers la forêt représentera l'objectif n°2 (objectif commun = 2 pts). Enfin, au centre, deux maisons seront les objectifs 1 (mon objectif secret pour 1 pt) et 4 tandis qu'un coin de forêt, au Sud, représentera l'objectif n°3.
Au premier tour, n'ayant aucune carte intéressante en main, je décide de passer mon tour pour échanger jusqu'à 3 cartes de ma main. Romain, de son coté, profite de mon attentisme pour foncer prendre le contrôle des objectifs 5, à l'Est, 1 et 4 au centre. Ce dernier ne rapporte certes pas de point mais il permet à l'Allemand de couvrir toute la route sur laquelle je suis sensé m'engager. Sa position est solide et il va m'être difficile de l'en déloger.
A mon tour, je vais prendre contrôle du point 2, planquer mes troupes dans la forêt qui fait face à la maison n°4, puis avancer en profitant de la couverture des haies vers l'église. Les premiers échanges nourrit ont alors lieu sans qu'aucun d'entre nous ne soit inquiéter. Il faut dire que l'attaquant part avec un gros malus : pour démoraliser une unité adverse (démoraliser une troupe déjà démoralisée, revient à la tuer), il faut que le score d'attaque (puissance de feu + jet de dés - malus de ligne de vue) soit supérieur à la résistance de l'unité (puissance de feu + jet de dés + valeur de moral + couverture). En gros, l'attaquant souffre d'un handicap de 6 à 9 (le moral) à chaque fois :shock: Et encore, dans la cas où la ligne de vue est dégagée et où le défenseur n'est pas à couvert !!!!
Preuve s'il en est de cette difficulté pour l'attaquant, 4 unités seulement seront touchées à distance de toute la partie. 1 sera retouchée et mourra. 2 autres seront perdues à cause d'évènements. La dernière se ralliera quelques tours plus tard.
A l'inverse, l'attaque au corps à corps, la "mêlée", est particulièrement meurtrière et aléatoire. En gros, on prend la puissance d'attaque de chaque unité, on y ajoute le jet de dé, et la plus faible valeur perd toutes ses troupes sur place. Plutôt violent ! Pour preuve ? Sur les 6 pertes infligées à l'Allemand que je ferais dans la partie, 5 seront le fruit de la mêlée et une... d'un sniper chanceux. En gros, j'ai gagné avec de la moule ! Un maximum de moule (même si j'ai eu de sacré revers aussi.)...
La suite n'est pas très glorieuse : je vais lancer un assaut massif sur l'église. Pendant mon déplacement les troupes de Romain vont me canarder et, profitant d'un évènement, tuer un Sergent et une escouade. Les deux escouades restantes arriveront néanmoins à se rapprocher suffisament pour lancer une mêlée au tour suivant. Chacun pioche une carte pour indiquer son lancer de dé : 9 pour moi, 5 pour Romain. Son lieutenant et une escouade meurt aussitôt. J'en profite pour activer un effet spécial me donnant 2 PV pour avoir survécut à la mêlée. Plus important encore, je prend possession de l'objectif secret de Romain.
Dans la foulée, je vais tuer l'autre escouade qui attendait derrière l'église, dans la forêt. De son coté, Romain, à force de tenter des tirs sur mes troupes planquées au N-O, sur l'objectif n°2, réussit à en toucher 2. Un deuxième tir réussit un peu plus tard, en tuera une, l'autre étant rallier juste après grâce à un ordre joué. Conscient qu'en restant là, je vais petit à petit me faire tuer, j'entame un long contournement avec une majorité des troupes que j'avais à l'Ouest et les regroupent avec celles de l'Est. Romain tente lui aussi une sortie mais ses troupes, arrivant l'une après l'autre, se feront tuer à chaque fois par une nouvelle mêlée.
1h30 après le début de la partie, je l'emporte alors très largement (10 PV d'avance) par élimination total de mon ennemi.
Que pensez alors de ce Combat Commander ? Romain et moins avons terminé cette partie assez circonspects. Si certains mécanismes sont vraiment intéressants (les différentes utilisations des cartes), le jeu a néanmoins présenté quelques écueils qui nous ont refroidi :
1- La gestion des cartes frustrante ! C'est simple : la moitié de nos tours de jeu a été utilisé pour passer notre tour et ainsi refaire notre main. Une situation particulièrement handicapante. Même à Mémoire 44, utilisant pourtant le même système, ce phénomène est beaucoup moins présent alors que, paradoxalement, il n'est pas possible de changer ses cartes. Ce problème est toutefois à modérer. En effet, nous jouions sur le premier scénario ce qui veut dire peu de troupes (donc peu de possibilités d'optimiser nos ordres) et une partie seulement des règles (3 ou 4 ordres ne servaient à rien et encombraient donc inutilement notre main). Je pense que sur un scénario "normal", cet effet doit fortement s'atténuer voir disparaître.
2- La difficulté de faire une touche. Avec le malus que j'ai décrit plus haut, il est très très difficile pour un joueur de faire un coup au but. Il y a alors deux façons de voir la chose : cela oblige l'attaquant à accumuler les bonus et à optimiser au mieux le positionnement de ses troupes (tir groupé notamment, présence d'officiers) ; cela accentue encore l'effet chance (exemple du double 1 que je sors quand Romain me tire dessus).
3- A l'inverse, la mêlée est une sorte de tout ou rien. Soit je rase l'armée adverse, soit je me fait massacrer. 100 % de chance de ce coté-là ! Vu les effets dévastateurs, c'est assez difficile à avaler (surtout pour Romain qui a perdu uniquement à cause de la mêlée !!). Deux solutions : soit nous avons commis une erreur de règles, soit cela signifie que la mêlée est une situation à éviter au maximum (sauf cas désespéré comme moi hier).
4- L'attribution des objectifs de manière aléatoire. Contrairement à un Conflict of Heroes ou à un Mémoire 44, les objectifs sont ici déterminés aléatoirement. On peut alors se retrouver avec tous les objectifs dans un camp ce qui déséquilibre forcément le résultat final.
5- De manière générale, la part très important de la chance dans le jeu. Tirage des cartes, tirages des objectifs, tirages des évènements, localisation de ces évènements, effets de bord (destruction ou récupération d'une arme enrayée), lancés de dés font que la chance intervient partout. Vous me direz que c'est plutôt normal dans un wargame. Mais pas autant. Ainsi dans Conflict of Heroes, la chance n'intervient que dans les lancés de dés (pour les attaques) et le tirage des cartes (cartes qui n'ont qu'un rôle de soutien... et donc pas aussi déterminant que dans Combat Commander ou Mémoire 44). D'un autre coté, les premières parties de Mémoire 44 donnent souvent l'impression aux débutants que tout le jeu repose sur la chance. Que gagner revient à être le plus chanceux et pas forcément le meilleur. Pourtant, cette impression disparaît assez vite quand on prend la peine de creuser plus avant : attendre d'avoir les bonnes cartes pour attaquer, savoir utiliser au mieux la percée, profiter du terrain, jouer avec les probabilités pour réduire au maximum les risques, etc. On peut supposer qu'il en est de même avec ce Combat Commander et que c'est l'apparente complexité des calculs de puissance d'attaque qui brouille les pistes. Seule une deuxième partie (voir une 3e) permettra de trancher.
6- Le faible nombre de scénario. Par rapport à un CoH, et surtout à un Mémoire 44, le jeu ne propose qu'une très faible modularité du terrain de jeu (juste les objectifs, les placement et les O.B initiaux changent). Les scénarios étant imprimés sur des plateaux souples (4 ou 5 dans la boite ?), j'ai peur qu'on ne tourne rapidement en rond, à refaire souvent les mêmes choses, à faire les mêmes approches, à prendre les mêmes maisons. Mais je me trompe peut-être.
7- Enfin, un ressenti plus personnel : le jeu souffre de la comparaison avec Mémoire 44, comparaison rendue obligatoire par le thème (2e GM), l'aspect wargame (beaucoup de règles sont plus ou moins communes) et le système de gestion des cartes (1 carte = 1 activation d'unités). Le jeu de Days of Wonder est plus beau, plus varié, plus court et beaucoup plus simple à appréhender pour un plaisir identique (voir supérieur). Le seul aspect qui pourrait lui permettre de briller, c'est son coté simulation plus poussée. Sauf que Conflic of Heroes me semble faire mieux sur cet aspect, en moins aléatoire. Reste que je n'ai pas testé toutes les règles ! S'il faut avec le soutien d'artillerie notamment, le jeu prend une toute autre dimension...
Bref, ce premier contact m'a plutôt refroidit. Je n'ai pas eu l'impression de vivre la partie, plutôt de la subir. Pire, je gagne grâce à un coup de dé (3 en fait :P ) et pas sur mes stratégies employées. Mais certains éléments et mécanismes m'ont plu. Surtout, j'ai pu apercevoir les possibilités offertes par l'autre partie des règles et j'avoue que cela me donne envie de lui redonner une autre chance. Avec tous les ordres disponibles, plus d'unités et une meilleure connaissance des règles, je serais plus à même de me faire une idée définitive sur le jeu.
MODO : discussion de règles sur ce jeu ici